Benicarlo. Surveillance médicale : Stuk
Sifflement de la cartouche qui se vide.
La chaleur se répand, baigne mon corps immergé dans un océan de silence. Le noir m'entoure, m'emprisonne dans un vide calfeutré. La lumière rouge fait danser des taches pourpres à l'intérieur de mes paupières. Noir. Les points dansent et tournoient. Formant une farandole compacte, poussés par la vague de feu qui m'entoure. Allongé. Je ne touche plus le sol. Il est sous moi. Loin. Où ? Je vole. Apesanteur. Les points noirs se rassemblent, forment un vortex fou et silencieux qui grandit, envahit mes yeux. Une pointe blanche, dure. Elle perce ma paupière, transperce ma pupille. Chauffée à blanc. Le silence se tait, sifflement aigu, invisible, il me fait sortit de ma tête. Mon corps dérive derrière moi, il flotte. Disparaît. Englouti par un nuage. Rien. L'antichambre. Je la connais, j'y suis déjà passé. Certains croient qu'il n'y a rien derrière. Pas moi. Plus moi. Je dérive, j'attend. Tout est blanc, chaud, sec. Vide. Mes yeux s'ouvrent. Mais je n'ai pas d'yeux. Je vois à travers mes paupières. Comme un rêve. Réel. Trop. Je dois attendre. Tout le monde doit attendre. Certains en meurent. Pas moi. Plus moi. La couleur revient. Les portes blanches s'ouvrent, les vibrations m'envahissent, résonnent, je plonge.
Je tombe. Vide. Vite. Sifflement de l'air qui me précipite vers mes nuages effilochés. Un tourbillon me happe, je glisse dans un vortex effréné. Quelqu'un hurle. Je suis seul. Des mondes défilent autour de moi, me dépassent en trombe. Je vois des soleils, des planètes, des villes et des hommes. Je peux m'arrêter. Je fixe un soleil, je l'atteint, je saisi sa planète, rouge, ocre, sang. Elle glisse sur son orbite, résistance gravifique. Je tords le tissus de l'univers. Elle roule, se décroche, tombe. Je repars, je vole. Poussé par mon inertie. L'énergie s'accroche dans mes filets. Je l'aspire. Je grandis, je me répands dans l'univers. J'englobe les galaxies en moi, je suis devenu le ciel. Trop grand, instable. Je m'effondre, me froisse. Je lâche. Tombe. Je suis immortel. Je ne devrais pas. Pas ici.
Illusion. Ce ne sont pas mes idées. Je tombe toujours. Le sol s'approche, cimetière noir jonché de squelettes et de pics, la sécurité. Mon nom. J'oublie toujours mon nom. Mon code. Sink. Ouverture. La porte de l'antichambre était piégée. Des mouches sont prises dans les filets, des hommes, perdus dans le labyrinthe d'une puissance illusoire. Pas moi. Plus moi.
Je pénètre dans ce monde immaculé qui est devenu ma demeure. Le silence attentif m'entoure, en attente de mes ordres. Sous moi je contemple le monde. Chaque pays, chaque personne, chaque atome m'apparaît avec la clarté que confère l'omniscience.
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